Communiqué de presse Journalisme scientifique

Dormir est facile. Cependant, “rechercher le sommeil” peut devenir assez compliqué. Nous expliquons l’actualité de la recherche.

Dans un nouvel article (publié dans un numéro spécial “Physiologie du Sommeil” de « Current Opinion in Physiology ») nous examinons les connaissances actuelles et mettons en évidence ce qui devient de plus en plus clair :

  • Comment le sommeil est lié à la circuiterie de notre cerveau
  • Comment un cerveau endormi change lorsque les enfants grandissent
  • Que lors de longues phases d’éveil, le cerveau produit des signaux similaires au sommeil
  • Que ces signaux de sommeil ressemblent à une transition de conscience

Qu’arrive-t-il lors de la mystérieuse période de sommeil ?

Le cerveau rentre dans une activité unique, que l’on retrouve uniquement lors du sommeil : les oscillations lentes (slow oscillation). Cette oscillation lente ne peut pas être mesurée durant l’éveil et est présente uniquement lors du sommeil chez l’Homme tout comme l’animal [1]. Par des câbles « l’électroencéphalogramme » (ou EEG) permet de mesurer ce rythme lent directement dans le cerveau ou à la surface du cuir chevelu. Notre cerveau lui-même génère ce rythme correspondant à une impulsion lente de seulement une onde chaque seconde.

La production d’oscillation lente nous permet généralement de mesurer la profondeur à laquelle nous dormons (= à quelle profondeur le cerveau dort), et donc la probabilité de se réveiller. Plus le sommeil est profond, plus les oscillations sont produites intensément [2].

Les oscillations lentes sont importantes pour la régénération de notre cerveau. Grâce à elles il se restore, récupère et se recalibre pour la période d’éveil du jour suivant [3, 4].

Le sommeil des enfants est différent.

Chez l’adulte, les ondes lentes commencent le plus souvent au niveau du front, puis se répartissent dans d’autres régions vers l’arrière du crâne [5]. Dans l’article, nous présentons de nouvelles découvertes chez les enfants : à l’âge de scolarisation, les ondes lentes commencent principalement à l’arrière du crâne. Quand les enfants atteignent l’adolescence, de plus en plus d’oscillations lentes commencent au niveau du front [1].

Cela signifie deux choses : premièrement, que la circuiterie cérébrale dans le sommeil n’est pas identique chez les enfants et les adultes. Deuxièmement, que le sommeil des enfants en soi est fondamentalement différent de celui des adultes, et donc que l’état de sommeil subit un processus de maturation.

Pourquoi est-ce si important ?

Des recherches antérieures ont montré que :

  • Le sommeil est important pour l’apprentissage de nouvelles choses [3, 4, 6],
  • En dormant moins que d’habitude, les enfants (= leur activité cérébrale) réagissent différemment à cette réduction du sommeil par rapport aux adultes [7]
  • Lorsque nous vieillissons, la circuiterie de notre cerveau change, ce processus commence dans les premiers jours de la vie et dure jusqu’au début de la trentaine (!) [8]

Dans l’ensemble, nous comprenons de mieux en mieux à quel point un sommeil suffisant, et plus particulièrement à quel point les oscillations lentes, sont importantes pour la maturation. Il est possible qu’elles soutiennent de nombreux processus se produisant pendant la maturation cérébrale.

Fait intéressant, les patterns de déplacement des oscillations lentes à travers le crâne évoluent non seulement avec l’âge, mais changent également du sommeil de début de nuit au sommeil de fin de nuit. Cela montre que la circuiterie cérébrale change également lors de l’évolution du sommeil au cours de la nuit – c’est moins un «fil» mais plutôt une «dynamique». Nous comprenons maintenant que la dynamique du sommeil indique à quel point nous sommes attentifs ou conscients à ce moment.

Enfin, l’état de la recherche montre qu’il n’est pas encore complètement clair quel sont les effets des ondes lentes et des oscillations lentes sur notre cerveau. Elles pourraient simplement indiquer ce qui se passe dans le cerveau, ou elles pourraient aider à renforcer la circuiterie spécifiquement nécessaire du cerveau. Les fonctions possibles pourraient être, qu’elles aident à renforcer la mémoire, qu’elles nous aident à rester « dynamiques » et à s’adapter aux changements de l’environnement (évolution) ou qu’elles soutiennent le processus de développement du cerveau chez les enfants.

Nous remercions le professeur Igor Timofeev (Département de psychiatrie et de neurosciences, Université Laval, Québec, Canada), la professeure Monique LeBourgeois ((Sleep and Development Laboratory, Department of Integrative Physiology, University of Colorado Boulder, Boulder, CO, USA), le professeur Reto Huber (Child Development Center, University Children’s Hospital Zurich, CH), et le docteur Brady Riedner (Wisconsin Institute for Sleep and Consciousness, Department of Psychiatry, University of Wisconsin-Madison, Madison, WI, USA) pour ce projet collaboratif. Nous reconnaissons le soutien de cette recherche par: University of Zurich (Clinical Research Priority Program Sleep and Health; Forschungskredit FK-18-047; Medical Faculty; to SK), the Swiss National Science Foundation (PBZHP3-138801, PBZHP3-147180; PCEFP1-181279 to SK; P0ZHP1-178697 to SFS; PP00A-114923 to RH), the National Institutes of Health (MH-086566 to MKL); Canadian Institutes of Health Research (MOP-136969, MOP-136967 to IT), the National Institutes of Health (NS104368 to IT) and National Sciences and Engineering Research Council of Canada (298475 to IT).

REFERENCES

[1] I. Timofeev, S. Schoch, M. LeBourgeois, R. Huber, B. Riedner, S. Kurth, Spatio-temporal properties of sleep slow waves and implications for development, Current Opinion in Physiology  (in press).

[2] A.A. Borbély, P. Achermann, Homeostasis of human sleep and models of sleep regulation., in: M.H. Kryger, T. Roth, W.C. Dement (Eds.), Principles and Practice of Sleep Medicine W. B. Saunders, Philadelphia, 2000, pp. 377-390.

[3] G. Tononi, C. Cirelli, Sleep and the price of plasticity: from synaptic and cellular homeostasis to memory consolidation and integration, Neuron 81(1) (2014) 12-34.

[4] J.G. Klinzing, N. Niethard, J. Born, Mechanisms of systems memory consolidation during sleep, Nat Neurosci 22(10) (2019) 1598-1610.

[5] M. Massimini, R. Huber, F. Ferrarelli, S. Hill, G. Tononi, The sleep slow oscillation as a traveling wave, J Neurosci 24(31) (2004) 6862-70.

[6] R. Huber, M.F. Ghilardi, M. Massimini, G. Tononi, Local sleep and learning, Nature 430(6995) (2004) 78-81.

[7] S. Kurth, D.C. Dean, 3rd, P. Achermann, J. O’Muircheartaigh, R. Huber, S.C. Deoni, M.K. LeBourgeois, Increased Sleep Depth in Developing Neural Networks: New Insights from Sleep Restriction in Children, Front Hum Neurosci 10 (2016) 456.

[8] T. Paus, D.L. Collins, A.C. Evans, G. Leonard, B. Pike, A. Zijdenbos, Maturation of white matter in the human brain: a review of magnetic resonance studies, Brain Res Bull 54(3) (2001) 255-66.

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